CHAPITRE X
Le Horahor put regagner sans incident la planète Brael d’où il était parti.
Pendant son absence, l’inquiétude n’avait fait que croître dans la galaxie des hommes, et les nouvelles qu’il rapportait étaient loin d’être rassurantes. Partout, on se mit aussitôt au travail pour appliquer le programme arrêté d’un commun accord avec les hols.
Les durups se montraient de plus en plus audacieux. Leur infiltration était beaucoup plus profonde qu’on ne l’avait imaginé. Sur de nombreuses planètes, maintenant, on découvrait des suspects. Mais pour un que l’on démasquait, combien y en avait-il d’autres que l’on ne soupçonnait pas et qui poursuivaient sournoisement leur besogne d’espionnage et de démolition ?
La première visite de Rad Bissis, à son retour sur Brael, fut pour la famille Wilty. Celle-ci était inconsolable. Le fils, qui se destinait à une carrière d’ingénieur, venait de renoncer à celle-ci pour s’engager dans le corps des astronautes-patrouilleurs, afin d’aller combattre les durups dans l’espace. Quant au père, il se préparait à partir, dans quelques mois, pour une planète lointaine où il venait d’être nommé directeur d’une mine d’uranium.
Ils accueillirent Rad avec beaucoup d’émotion. Ils avaient craint de ne jamais le revoir. Ils parlèrent de Nora avec amour et avec tristesse. Ils se revirent souvent.
Un jour où le jeune astronaute était seul avec la mère de celle qu’il avait aimée et où il s’abandonnait devant elle à son chagrin, elle lui prit les mains et lui dit :
— Mon cher Rad, vos larmes me touchent infiniment et, si j’étais égoïste, je souhaiterais vous voir pleurer ainsi longtemps, car c’est pour moi une consolation que de savoir combien vous avez aimé ma fille. Mais vous êtes jeune. Vous ne pouvez pas sacrifier votre vie parce qu’un drame affreux vous a déchiré. Vous avez le droit d’être heureux. Vous avez le droit d’avoir une femme, des enfants. Te sais que vous garderez toujours dans votre cœur une place pour notre chère Nora. Nous ne vous retirerions pas notre affection si vous rencontriez un jour une femme digne de vous et si vous l’épousiez.
Rad fut très touché de ces paroles. Mais son chagrin était si profond qu’il n’imaginait pas que jamais une autre femme pût l’intéresser. La seule à laquelle il pensât parfois était Hira, la femme hol.
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Huit jours après le retour du Horahor, une terrible nouvelle bouleversa la galaxie : la planète Elantine, dans le système de Cassiopée, venait d’être conquise par les durups. C’était une planète de la catégorie A. Il est vrai qu’elle n’était pas très peuplée, car elle n’était habitée que depuis une date relativement récente. Mais on la considérait comme un futur joyau de la civilisation.
Les durups s’y étaient infiltrés en masse, sans qu’on s’en avisât. Des milliers d’entre eux y avaient pris la forme humaine. Ils s’emparèrent de l’astroport, des arsenaux, des centrales atomiques, bombardèrent la capitale et conquirent en quelques heures le reste de la planète, massacrant tous les habitants.
Ce fut comme un coup de tonnerre. On activa les préparatifs de défense. Partout, on soumit les équipages et les passagers des astronefs au test du sommeil prolongé – découvrant ainsi de nombreux durups camouflés. On étendit cette mesure à tous ceux qui occupaient des postes de responsabilité, et il était prévu qu’on allait l’étendre progressivement à toute la population, comme cela se faisait chez les hols.
Il n’en restait pas moins qu’avec la planète Elantine, les durups possédaient maintenant une base sur laquelle ils allaient pouvoir eux aussi construire des astronefs. Une expédition hâtivement formée fut envoyée pour tenter de les déloger. Mais elle arriva trop tard. Les durups avaient déjà installé des écrans pour se protéger contre les bombardements atomiques. Et Rad Bissis, qui avait participé à l’attaque comme commandant d’un astronef de combat, faillit périr dans cette aventure et revint à Brael quasi désespéré.
Il fut nommé membre du Comité de Défense Galactique dont le commandant Jokron assurait la présidence, et il se jeta dans le travail à corps perdu. La planète Brael, en raison de sa position, qui n’était relativement pas très éloignée de la zone neutre, était devenue un véritable arsenal et un immense chantier. C’était là que l’on construisait la majeure partie de la flottille destinée à assurer la liaison avec les hols. C’était de là que partaient en groupes les grands cargos dont la mission était de ramener de la substance neutre pour équiper les vaisseaux. Dans l’espace, sur leur trajet, les combats étaient fréquents entre les astronefs et les durups qui y circulaient sous leur forme originelle.
À Bory-Sinov, on voyait constamment débarquer des astronautes vêtus de la combinaison couleur corail et dont les visages et les mains étaient d’un bleu luisant.
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Trois mois s’écoulèrent, marqués par un travail fébrile pour le comité Jokron et pour tous ceux qui travaillaient à la défense. C’était maintenant l’hiver à Bory-Sinov, et les montagnes environnantes étaient couvertes de neige, mais la ville, grâce aux techniques du réchauffement par rayons infrarouges, gardait son ciel pur et sa douce température habituelle.
Jokron, Koel, Bissis et Brasdin étaient ce matin-là réunis dans le bureau du commandant lorsqu’on leur porta un message. Le visage de Jokron s’éclaira.
— Les hols viennent nous voir, dit-il. Trois de leurs astronefs ont franchi la frontière et ont déjà pris contact avec plusieurs de nos vaisseaux qui maintenant les escortent et les guident. C’est Roan Horahor en personne qui dirige cette mission. Ils arriveront ici ce soir. Je suis heureux qu’ils aient pu surmonter les difficultés, pires que les nôtres, auxquelles ils se sont heurtés pour préparer ce voyage.
Ce soir-là, tout le Comité de Défense, ainsi qu’une foule nombreuse – car la nouvelle s’était vite répandue – était sur l’astroport pour accueillir les visiteurs de la galaxie voisine. La flottille des astronefs hols et des astronefs humains apparut dans le ciel à l’heure prévue et bientôt se posa au sol. Jokron et Roan Horahor se donnèrent l’accolade, comme de vieux amis. Koel tira par la manche le commandant.
— Regardez, dit-il, ils ont eu la délicate attention de baptiser de votre nom le plus beau de leurs trois vaisseaux.
Les deux autres s’appelaient respectivement le Hel Sitine et le Brael, du nom de la planète que les hols venaient visiter.
Hira faisait partie de la mission. C’était elle qui avait piloté l’astronef où son père avait pris place. Le commandant Jokron et ses principaux collaborateurs du comité connaissaient déjà la plupart des hols qui étaient là. Ils les revirent avec joie. Il y eut de nouvelles conférences, au cours desquelles on se mit au courant de ce qui avait été fait de part et d’autre. Les hols visitèrent Bory-Sinov dans les mêmes conditions que leurs hôtes avaient visité Rohohir quelques mois plus tôt, c’est-à-dire sans jamais quitter leurs scaphandres légers.
Rad Bissis fut chargé à plusieurs reprises de piloter Hira à travers la ville. Il fut frappé par la justesse des remarques que faisait la jeune fille lorsqu’elle était dans une usine, dans un laboratoire ou à un spectacle. Il fut étonné par sa culture et son sens critique. Elle parlait maintenant le pangalactique sans le moindre accent, mieux que Rad ne parlait la langue des hols.
— J’aimerais visiter la planète mère de votre civilisation, dit-elle à Rad, cette Terre où vous êtes né. J’ai lu son histoire avec le plus vif intérêt dans les documents que vous nous avez apportés. Chez nous, la planète mère, c’était Hihar, d’où je suis originaire. Mais Hihar est maintenant occupée par les durups…
— Nous vous aiderons à la reconquérir, lui dit Rad.
— Je le sais, fit-elle. Et c’est pourquoi j’ai pour vous tant d’amitié. Vous êtes l’être pour qui j’en ai le plus depuis la mort de mon fiancé.
Il voyait son fin et triste sourire à travers le hublot de son casque.
Elle lui dit encore :
— Nous savions déjà que vous, les hommes, vous nous ressembliez à un point tel que l’on pourrait nous confondre. Mais je ne pensais pas, avant de vous avoir vus hors de vos scaphandres, que c’était aussi frappant. Je ne suis pas du tout dépaysée sur cette planète.
Lorsque Rad alla faire une dernière visite aux Wilty, avant le départ de ceux-ci pour la planète où le père allait occuper un nouveau poste, Hira voulut l’accompagner.
— J’aimerais dire aux parents de votre malheureuse fiancée, combien je compatis à leur douleur. Vous savez, Rad, que chez les hols on vous admire beaucoup pour tout ce que vous avez fait… Tout le monde connaît le drame qui a assombri votre vie.
Ils passèrent tout un après-midi chez les amis du jeune astronaute. La mère de Nora s’entretint longuement avec Hira.
Lorsqu’ils se séparèrent, elle prit Rad à part et lui dit :
— Mon cher enfant, j’ai été très touchée par les paroles de cette jeune femme venue d’un monde si lointain. Je regrette de n’avoir vu que son visage enfoui dans cet affreux scaphandre. Elle est non seulement charmante, mais elle est pleine de finesse et de tact. J’ai compris qu’elle avait pour vous beaucoup de sympathie, pour ne pas dire plus…
Rad rougit.
— Croyez bien…
— Ne dites rien… Mais comment pourrait-on faire, Rad, pour ne pas vous aimer ?… Rappelez-vous ce que je vous ai dit il y a quelque temps… Et c’est la mère de votre fiancée morte qui vous parle… Si vous deviez vous marier un jour, j’aimerais que ce fût avec une jeune fille comme celle-là… Mais n’est-il pas terrible que les hommes et les hols ne puissent jamais se voir qu’à travers des scaphandres ?… Embrassez-moi, Rad. Je ne sais pas si je vous reverrai jamais, car cette lutte contre les durups est affreuse… Mais je fais des vœux pour que vous ayez une vie heureuse.
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* *
Les hols ne restèrent qu’une quinzaine de jours à Bory-Sinov.
Comme trois nouveaux astronefs aménagés pour aller dans leur galaxie étaient prêts, il fut convenu que les équipages de Jokron partiraient avec les vaisseaux des visiteurs et qu’ils feraient route ensemble.
Toute une cargaison de containers isolants remplis de terre de la planète Brael – une terre qui au-delà de la frontière deviendrait de l’antimatière explosive – fut chargée dans les astronefs, et le départ eut lieu par un radieux après-midi d’hiver.
Presque dès le départ, la flottille se heurta à des durups, mais les dispersa aisément. Au-delà de la zone neutre, les assauts furent plus rudes. Mais toute une flotte de hols vint à la rescousse, et les vaisseaux transgalactiques arrivèrent sans dommage à Rohohir.
La première visite de Jokron et de ses compagnons fut pour des installations nouvelles dont les hols ne voulurent pas dire à quoi elles étaient destinées.
— Nous préférons vous en laisser la surprise, dit Roan Horahor.
Ils arrivèrent, au milieu d’un beau jardin, devant un bâtiment d’aspect élégant qui portait ces mots à son fronton : Centre Jokron.
Ils furent surpris, en effet. Mais Roan Horahor expliqua aussitôt :
— Vous serez mieux ici que dans votre astronef pendant votre séjour parmi nous. Nous avons aménagé ce pavillon pour vous y loger. Partout à l’intérieur, il est revêtu de matière isolante. Tout ce qu’il contient, les meubles, les objets usuels et décoratifs, les tissus, est fait de substance neutre. Il suffira que vous ameniez là un de vos générateurs d’oxygène, votre eau et vos vivres. Nous avons prévu de grands « containers » pour effectuer ce transport. Les sas d’entrée offrent une sécurité absolue.
Leur seconde visite fut aussi pour une installation nouvelle, une usine où avait été amené le stock d’antimatière. Ils y virent des salles munies de revêtements neutres, où travaillaient, dans le vide absolu, des spécialistes vêtus de scaphandres. Des laboratoires étaient équipés de la même façon. On allait y étudier, à des fins pacifiques, la « domestication » de l’antimatière. Dans d’autres salles, allaient être fabriquées sans grands frais ni grands efforts les bombes qui seraient armées de détonateurs spéciaux.
Joe Koel, qui accompagnait Bissis et Jokron au cours de cette première visite, se frottait les mains.
— Je crois, dit-il, que les durups ne vont pas tarder à déguerpir des planètes qu’ils occupent.
Il fallut, hélas ! déchanter.
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Une première expédition avait été organisée, à laquelle participèrent les vaisseaux des hommes. Ce fut une expédition massive : plus de cent astronefs y prirent part, qui chacun emportait une vingtaine de bombes. Le poids et la puissance de celles-ci avaient été calculés pour qu’elles causent des ravages en surface, mais sans détruire les planètes elles-mêmes que les hols espéraient récupérer ensuite et désinfecter.
Quatre d’entre elles avaient été choisies comme objectifs, et elles étaient toutes les quatre assez voisines de Brango.
Une foule immense salua avec espoir le départ de cette flotte imposante. Le grondement des réacteurs emplissait Rohohir.
Les vaisseaux de l’espace foncèrent tout d’abord sur Hikkin, une planète du système le plus proche, où les durups, cinq ans plus tôt, avaient massacré toute la population.
Rad Bissis, qui commandait le Vengeur (il avait lui-même insisté pour qu’on le baptisât de ce nom), attendait avec une impatience passionnée le moment de lâcher sur les durups sa cargaison de mort. Brasdin était à ses côtés.
— J’espère que nous allons réussir, dit-il.
— Ce serait à désespérer de tout si nous ne réussissions pas !
Par un hasard exceptionnel, comme si la chance avait été à leurs côtés, ils ne rencontrèrent point de durups sur leur trajet, ni sous forme de corps lumineux ni sous forme d’astronef.
Arrivés à proximité de la planète Hikkin, ils effectuèrent une subtile et prompte manœuvre pour l’encercler de toutes parts, afin de faire un arrosage complet et simultané. Ce fut Roan Horahor qui lança sur les ondes l’ordre d’ouvrir le feu. Rad Bissis alla lui-même actionner les leviers qui éjectaient les bombes. Il le fit par trois fois. La première, il s’écria :
— Voilà pour venger Nora !
La seconde :
— Voilà pour venger Hoal Horahor !
Et la troisième :
— Voilà pour venger tous ceux que les durups ont fait périr !
Une sorte de rage l’animait. Ses yeux luisaient de colère.
La planète avait des écrans magnétiques protecteurs qui auraient pu résister à un bombardement atomique de même nature que ceux que les hols tentaient encore de temps à autre. Mais ils ne résistèrent pas à l’avalanche des explosions de l’antimatière. Bientôt, Hikkin ne fut plus qu’une sorte de brasier.
Rad Bissis contemplait ce spectacle avec joie.
Il se tourna vers Brasdin et lui dit :
— Cette fois, je crois que nous les tenons !
La même joie débordante régnait à bord de tous les astronefs et bientôt se répandit dans toute la civilisation des hols. Partout, on éprouvait un sentiment de délivrance.
Mais la joie, hélas ! fut de courte durée.
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* *
Tandis que l’on fêtait cette victoire, la flotte d’astronefs que commandait Roan Horahor se dirigeait vers son second objectif, la planète Koamr, située dans une constellation voisine.
La durée du trajet était de huit heures. Ils mirent beaucoup plus longtemps car, cette fois, ils se heurtèrent à deux reprises à des flottilles de durups et ils perdirent plusieurs de leurs astronefs au cours de combats qui furent violents.
Une troisième bataille s’engagea aux abords mêmes de la planète. Ils réussirent à repousser leurs assaillants et à effectuer autour de Koamr la même manœuvre qui leur avait réussi contre Hikkin. Leurs bombes furent déclenchées dans les mêmes conditions de précision et de simultanéité. Mais rien ne se produisit…
Ce fut pour eux de la stupeur.
Leurs bombes n’éclataient pas. Or de toute façon, elles auraient dû éclater, soit sur le sol de la planète, soit, si elles n’avaient pas pu atteindre celui-ci, sur l’écran protecteur.
Que se passait-il ?
Rad Bissis, qui avait comme précédemment actionné les leviers et vu les engins de mort filer vers leur objectif, restait comme pétrifié, incapable de prononcer un mot. Brasdin lui aussi demeurait immobile et silencieux. Il passa sa main sur son front.
— Je me demande si je ne rêve pas, dit-il enfin. Pourquoi nos bombes n’ont-elles pas explosé ?
On se posait la même question dans tous les astronefs.
Le commandant Jokron, qui était lui aussi frappé de stupeur, lança un message à Roan Horahor : « Avez-vous une idée de ce qui se passe ? ».
La réponse vint dans la minute : « Pas la moindre idée. Tous nos savants recherchent la cause… ».
Plusieurs minutes s’écoulèrent, durant lesquelles la flotte tourna autour de Koamr sans qu’aucune décision fût prise par son état-major.
Puis Jokron reçut un message de Horahor :
« Venons de détecter des radiations d’une nature inconnue émises par la planète… Il existe peut-être un rapport entre ces radiations et le fait que nos bombes n’ont pas explosé. Les durups ont sans doute trouvé un moyen de défense dont nous ne soupçonnons même pas de quoi il est fait… Restez sur la même orbite jusqu’à nouvel ordre… Nous continuons nos observations avec l’espoir de découvrir quelque chose. »
À bord du Vengeur, Rad Bissis et Dob Brasdin, installés maintenant devant un hublot, examinaient le globe énorme qui roulait dans l’espace au-dessous d’eux.
— Regarde, dit Brasdin, on dirait qu’un halo verdâtre est en train de se former autour de la planète.
— C’est exact. Ils ont dû inventer encore je ne sais quoi.
Le halo devenait plus net de minute en minute. Il semblait parcouru par de curieuses vibrations. On l’observait de tous les astronefs.
Ce fut le commandant adjoint Joe Koel qui le premier eut le soupçon de ce qui avait pu se passer. Il alla rejoindre Jokron et lui dit :
— Je ne vois qu’une seule explication à tout ce mystère. Ce ne sont pas les écrans protecteurs qui ont résisté. De toute façon, nos bombes auraient éclaté au-dessus de l’atmosphère. Pour moi, les durups ont découvert que nous les bombardions avec de l’antimatière, et ils doivent avoir un moyen de renverser la polarisation de celle-ci. À peine les bombes commencent-elles à éclater qu’elles deviennent inoffensives. Les radiations inconnues qui ont été détectées doivent remplir cet office.
— Oui, fit Jokron après avoir réfléchi un instant, c’est probablement cela. Mais dans ce cas, tous nos efforts auront été inutiles… C’est effrayant…
Il passa un message à Horahor pour lui faire part de l’hypothèse de Koel. L’instant d’après, le hol répondait :
— Vous avez certainement raison. Il n’y a pas, en effet, d’autre explication. Nous allons toutefois faire une tentative sur le troisième objectif prévu, et si elle échoue nous regagnerons Rohohir.
La flotte se remit en marche, se heurta encore à des durups, subit encore des pertes. Et la troisième tentative échoua tout comme la seconde.
Quand ils arrivèrent aux abords de la planète Soïram, qu’ils devaient bombarder, celle-ci était déjà entourée d’un halo verdâtre.
Ils lâchèrent quelques bombes, à tout hasard. Elles n’éclatèrent pas.
Ils étaient très déprimés lorsqu’ils arrivèrent à Rohohir, où régnait la consternation. La réunion que tint peu après l’état-major d’astronautes et de savants fut des plus mornes.
Roan Horahor et Harf Jokron, qui l’un et l’autre avaient toujours fait preuve du plus grand calme et du plus grand sang-froid, semblaient pour la première fois abattus et désespérés.
— Je crains bien, dit Jokron, que l’aide que nous espérions pouvoir vous apporter ne soit en définitive très mince.
— Elle nous a en tout cas réchauffé le cœur, croyez-le bien, et cet échec ne diminue pas la reconnaissance que nous avons envers vous. Mais les durups sont plus forts que nous… Nous sommes bien obligés de le constater…
Hira se leva. Ses beaux yeux noirs brillaient d’un éclat inaccoutumé.
— Pour moi, dit-elle, je me refuse à désespérer…